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  • : L'Oeil sur la Toile
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" Qu'il  s'agisse de penser le devenir ou de l'exprimer, ou même de le percevoir, nous ne faisons guère autre chose qu'actionner une espèce de cinématographe intérieur. Le mécanisme de notre connaissance usuelle est de nature cinématographique." 

                             
                                   H. Bergson, l'Evolution créatrice.



                                                                                                                                                         

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Bonjour à tous !


 

Bienvenue à tous les amoureux du 7ème art...

 

Ce blog se propose de porter un regard analytique sur le cinéma d’aujourd’hui et d’hier. Un coup d'œil également sur le parcours des dernières sorties Ciné et DVD. Ici, on décortique le film, on donne son avis, on parle de nos coups de cœur, etc.  N'hésitez pas à laisser vos commentaires.

 

Bonne lecture...

 

 



18 juillet 2008 5 18 /07 /juillet /2008 19:42

    

     C’est grâce à Shin que j’ai découvert le principe de cette liste cornélienne du cinéma, doux euphémisme pour « liste à la con » tant les choix s’avèrent difficiles, et voici le résultat que j'ai tout de même pris plaisir à constituer. Toutefois, comme le dit par ailleurs Dasola, si je dois refaire cette liste demain, il est probable qu’elle ne soit plus exactement la même. J’espère que vous aurez à votre tour le courage de vous y coller. J’attends vos résultats dans les commentaires…

 

LA LISTE :

 

- Un film étranger : The Big Lebowski, des Coen.
- Un film français : La Haine, de M. Kassovitz.
- Un film d'animation : Le Château ambulant, de H. Miyazaki.

- Une saga : Sympathy for Mister Vengeance, Old Boy et Lady Vengeance de Park Chan-Wook (ou bien sûr celle du Parrain de Coppola)
- Une suite : Kill Bill II, de Tarantino
- Un remake réjouissant : Les 7 mercenaires, de J. Sturges (pour Les 7 Samouraïs, de Kurosawa).

- Un trio de réalisateurs : Kurosawa, Coen, Scorsese
- Un trio d'acteurs : Vincent Cassel, Robert De Niro, Forest Whitaker
- Un trio d'actrices : Karine Viard, Isabelle Huppert & Tang Wei

- Un scénario : Pulp Fiction, de Tarantino
- Une révélation : Les formes de Santanico Pandemonium (Salma Hayek) dans Une Nuit en enfer, de R. Rodriguez.
- Une rencontre d'acteurs : Le trio d'acteurs dans Le Clan des Siciliens (Gabin, Ventura, Delon), de Verneuil

- Un début : Raging Bull, de M. Scorsese
- Une fin : Fight Club, de David Fincher
- Un coup de théâtre : La révélation finale de Usual Suspect, de B. Singer (découverte de l’identité de Kaiser Sauzé)

- Une affiche : La Cité de Dieu, de F. Mereilles (ou L’Homme des hautes plaines, de C. Eastwood).
- Une bande-annonce : Les Simpson, le film, de D. Silverman.
- Un générique : 800 balles, de Alex de la Iglesia

- Un gag : Claude Brasseur qui joue les aveugles dans Un Eléphant ça trompe énormément, de Y. Robert.
- Un fou rire : Walter qui jette les cendres de Donnie dans The Big Lebowski, des Coen.
- Un clown triste : Coluche dans Tchao Pantin, de C. Berri / (sinon Chaplin en général).

- Une réplique : « Il nous a fait courir le merdeux... » (B. Poolevord), dans C’est arrivé près de chez vous, de R. Belvaux.
- Un silence : La fin de No Country for old men, des Coen.
- Une mort : Celle de Guido (Benigni) dans La Vie est belle, de Benigni.

- Un rêve : Des spectateurs silencieux pendant la projection du film.
- Un regret : La place de cinéma est trop chère.
- Un plaisir coupable : L’hôtel de la plage, de M. Lang.

- Une histoire d'amour : Celle de Lune Froide, de P. Bouchitey.
- Un regard : Lee Van Cleef dans Le Bon, la brute et le truand, de S. Leone.
- Un sourire : Jack Nicholson (The Joker) dans Batman, de T. Burton.

- Un fantasme : Jessica Rabbit dans Qui veut la peau de Roger Rabbit, de R. Zemeckis.
- Un baiser : Jennifer Tilly & Gina Gershon dans Bound, des Wachowski.
- Une scène d'amour : Eiko Matsuda & Tatsuya Fuji dans L’Empire des Sens, de Nagisa Oshima

- Un plan séquence : Celui du marais et du nénuphar dans La Légende du Grand Judo, de A. Kurosawa.
- Un plan tout court : Les grattes ciel de Tokyo dans Babel, de Inarritu.
- Une scène clé : Celle qui dévoile le pot aux roses dans Le Sixième Sens, de M. Night Shyamalan

- Un choc plastique en couleurs : Hero de Zhang Yimou (ou, plus vieux, La Cité des Enfants Perdus, de Caro et Jeunet).
- Un choc plastique en noir et blanc : Down By Law, de J. Jarmusch
- Un choc tout court : Salo ou les 120 jours de Sodome, de Pasolini

- Un artiste sous estimé : Les réalisateurs B. Delépine et G. Kervern pour Aaltra.
- Un artiste surestimé : Sean Pean (ou Léonardo DiCaprio)
- Un artiste trop rare : Steve Buscemi.

- Une déception : Astérix aux Jeux Olympiques, de Frédéric Forestier et Thomas Langmann.
- Un somnifère : Matrix Révolutions (3), des Wachowski
- Un gâchis : Les Bronzés 3, de P. Leconte.

- Une découverte récente : Le Roi et le Clown, de L. Jun-IK (moins récent : Little Miss Sunshine, de J. Daiton et V. Faris).
- Un traumatisme : L’extincteur dans Irréversible, de G. Noé
- Un torrent de larmes : Les Bronzés 3 (de vraies larmes de tristesse)

- Une chanson : 54-46 Was My Number (Toots and the Maytals), dans This is England, de S. Meadows (ou Where is my mind (Pixies), dans Fight Club, de D. Fincher.
- Une musique : Il était une fois dans l'ouest (Morricone), de S. Léone.
- Une bande son : Ascenseur pour l’échafaud (L. Malle), de Miles Davis

- Un sursaut : Jack Nicholson dans Shining, de S. Kubrick
- Un frisson : La scène de l’ascenseur dans The Eye, des Pang. (ou bien-sûr Sueurs froides, de Alfred Hitchcock)
- Un souvenir de cinéma qui hante : La jambe de James Caan dans Misery, de R. Reiner

- Une explosion : Celle du château nazi dans Les Douze Salopards, de Robert Aldrich
- Un gunfight : Cage vs Travolta dans Volte-Face, de J. Woo
- Un combat : Le duel sous la neige dans Goyokin, de H. Gosha.

- Une arme : La carabine à air comprimé de Chigurh dans No Country for old men, des Coen
- Un héros : Maximus (R. Crowe) dans Gladiator, de R. Scott
- Un méchant : Gleen Close dans Liaison Fatale, de A. Lyne (ou Alex De Large dans Orange Mécanique, de S. Kubrick)

- Un serial killer : Hannibal Lecter (Anthony Hopkins) dans Le Silence des Agneaux, de J. Demme
- Un croque-mitaine : Beetlejuice (Michael Keaton), de Tim Burton
- Un monstre : Alien, le huitième passager, de Ridley Scott.

P.S: Pour bien faire, élaborer une liste par décennie serait sans doute plus juste et moins frustrant... Avis à tous les passionnés!
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4 juillet 2008 5 04 /07 /juillet /2008 13:16


     S’il vit le jour lors de la fameuse soirée du 28 décembre 1895, avec l’invention des frères Lumière, il fallut attendre la fin des années 1930 pour que le cinéma se trouve authentiquement théorisé.  Jusqu’à cette date, les projections cinématographiques n’intéressaient principalement que les scientifiques (aspects techniques) et étaient globalement considérées comme des phénomènes de foire, qui effrayaient (réalisme) et foutaient souvent le feu (nombreux faits-divers). Très marginal, le 7ème art naissait et quelques rares ciné-clubs ouvraient. A cette époque, on ne pouvait pas encore vraiment parler de culture cinématographique. En outre, la transition du muet au parlant ne s’est opérée qu’à la fin des années 20 – précisément en 1927 avec Le Chanteur de Jazz, de Alan Crosland, premier film du cinéma parlant. Cette mutation, lourde de sens, ouvrit alors la porte au logos et par voie de conséquence à l’analyse. Dés-lors, les revues spécialisées firent gentiment leur apparition la décennie suivante, notamment La Revue du Cinéma (1930) qui sera prolongée par Les Cahiers du Cinéma (1951). Bien-sûr, la génération d’intellectuels qui s’attaque à cette matière n’en est qu’à ses premiers balbutiements et l’on envierait presque leur enthousiasme devant le pan inédit de réflexion qui s’offre à eux. Sous cet angle, voici un texte du cinéaste et intellectuel Jean Epstein rédigé en 1946, lu cette semaine par hasard, qui m’a particulièrement intéressé. Coup de projecteur sur une pensée charnière :


Jean Epstein : L’œil-cinéma


     Le cinématographe ne fut d’abord qu’un regard enregistreur, s’intéressant superficiellement à tous les spectacles du monde ; puis on l’employa, ici à l’analyse de mouvements rapides, et là à la découverte des mouvements lents ; en même temps ou plus tard, on lui  apprit à grandir l’infiniment petit, à rapprocher l’infiniment lointain ; enfin, à cet œil, on adjoignit, après bien des tâtonnements, une oreille et un organe d’élocution. Et, tout à coup, on s’aperçoit qu’ainsi a été créé une sorte de cerveau mécanique partiel, qui reçoit des excitations visuelles et auditives qu’il coordonne à sa manière dans l’espace et le temps, et qu’il exprime, élaborées et combinées, sous une forme souvent étonnante, d’où commence à se dégager une philosophie riche, elle aussi, en surprises. Philosophie qui n’est sans doute, ni due tout à fait au hasard, ni complètement étrangère aux règles de l’intelligence humaine dont elle est directement née. Le cinématographe est un dispositif expérimental qui construit, c’est-à-dire qui perçoit, une image de l’univers ; ainsi ne possède-t-il que la faculté, mais obligatoire, de réaliser (de rendre réelle) la combinaison de l’espace avec le temps, de donner le produit des variables de l’espace par celles du temps, d’où il résulte que la réalité cinématographique est bien essentiellement l’idée de localisation complète. Mais ce n’est qu’une idée, et une idée artificielle, dont on ne saurait affirmer aucune autre existence qu’idéologique et artificielle, un truquage en quelque sorte. Seulement le trucage se rapproche extrêmement du procédé selon lequel l’esprit humain lui-même se fabrique généralement une réalité.

 

                                J. Epstein, 1946, L’Intelligence d’une machine, Editions Jacques Melot. (pages 186-187).


 

     A bien des égards, ce texte de J. Epstein semble très proche de la réflexion phénoménologique qu’entreprit Maurice Merleau-Ponty au sujet du cinéma dans sa conférence du 13 mars 1945 à l’Institut des Etudes cinématographiques (que l’on trouve dans son ouvrage Sens et non-sens).

      En effet,  Maurice Merleau-Ponty disait alors du cinéma qu'il est « l'art philosophique », car il permet de saisir immédiatement ce que signifie « être au monde ». Non pas simplement être dans le monde comme un objet inanimé, ni au-dessus du monde comme un dieu, mais au monde comme un corps-sujet.  Être au monde, c'est toujours être pris dans une situation perceptive qui définit un certain point de vue. (« Il (le film) nous offre cette manière spéciale d’être au monde. »). Ainsi, la caméra correspond-elle toujours un œil, à un corps-propre. C'est le point de vue d'un sujet, mais virtuel, (« trucage » nous dit Epstein), le point de vue de quelqu'un qui n’apparaît pas, d'un œil qui serait « déjà dans les choses ». Ce sont donc tout d’abord les sens qui sont sollicités ; « un œil, une oreille et un organe d’élocution » – Epstein. Dans la salle obscure, les enjeux de la perception s’avèrent évidemment déterminants. « C’est par la perception que nous pouvons comprendre la signification du cinéma : un film ne se pense pas, il se perçoit » (Merleau-Ponty). Plus encore, puisqu’il s’agit d’un corps virtuel, (libérée des contraintes d’un corps réel), le cinéma nous rapproche autant que faire se peut de la « perception pure » chère à Henri Bergson (« inter-pénétration »).
 
   
Petit rappel : pour Merleau-Ponty, comme aussi pour Bergson, la théorie classique et rationaliste de la perception, telle qu’on la retrouve par exemple dans l’analyse du morceau de cire de Descartes (Méditations métaphysiques, 2ème Méditation)), n’est pas valable. En effet, contrairement à Descartes qui faisait de la perception une activité de l’esprit essentiellement, une intellection, Merleau-Ponty l’envisage, lui, de manière charnelle comme immersion dans un monde d’un corps-propre co-extensif. (La phénoménologie refuse ainsi le dualisme âme/corps). La perception ici est synthétique et non analytique. D’une manière plus générale, c’est toute l’orientation que doit prendre la philosophie qui est remise en question : soit un enchaînement de concepts (rationalisme), soit une conscience d’abord jetée originellement et corporellement dans un monde (phénoménologie). Ici intervient le cinéma : « Une bonne part de la philosophie phénoménologique consiste à s’étonner de cette inhérence du moi au monde et du moi à autrui, à nous décrire ce paradoxe et cette confusion, à faire voir le lien du sujet et du monde, du sujet et des autres, au lieu de l’expliquer, comme le faisaient les classiques, par quelques recours à l’esprit absolu. Or, le cinéma est particulièrement apte à faire paraître l’union de l’esprit et du monde, et l’expression de l’un dans l’autre.». C’est là implicitement voir dans le cinéma une légitimation de la phénoménologie. Explications :

                                                                                                                                                                                                                 
     D’emblée, Merleau-Ponty pose de façon décisive le film comme « objet à percevoir ». Celui-ci est par essence une forme temporelle, visuelle et sonore cohérente. Ainsi considéré, le cinéma n’est pas une accumulation ou une addition d’images isolées et indépendantes. Au contraire, une image n’a de sens que dans et par cette forme unifiante ; c’est la forme du film qui détermine la place de chaque image : « Le sens d’une image dépend donc de celle qui la précède dans le film ». En négatif, c’est également mettre en évidence les insuffisances d’une approche seulement structuraliste du cinéma, notamment en ce qui concerne la vérité nouvelle et encore approximative à l’époque de « l’analyse plan par plan », (le film alors était semblable à un cadavre que l’on autopsiait en le démembrant et le désossant). Le sens et le retentissement en nous n’étant pas dans les plans mais entre les plans, il faut donc voir le film comme une totalité indivisible. Merleau-Ponty utilise pour cela les termes « d’unité mélodique du film. » Certes, mais qu’est-ce qui en fonde l’unité ? Précisément, le rythme. Chaque film a un rythme qui n’appartient qu’à lui. Aujourd’hui, on parle plus volontiers de style. (Sous cet angle, on pressent déjà l’association avec l’œuvre d’art). Ce rythme se caractérise par des éléments temporels tels que, par exemple, l’ordre et la durée de l’image prise dans une totalité, ou encore la « simultanéité » de la forme sonore. (Epstein dans le texte fait référence à une « idée de localisation complète » assez explicite). Celle-ci s’avère alors fondamentalement significative. Que nous dit-elle ? Quel est le sens du film ?

 

     Pour Merleau-Ponty, le film a toujours une signification, quoique celle-ci ne soit pas essentiellement intellectuelle. En effet, le film n’est ni un documentaire, ni une pédagogie ni une re-présentation. Selon lui, l’essence du cinéma ne consiste pas à exposer scientifiquement des concepts, à décrire didactiquement des idées, mais bien plutôt à faire surgir une « fonction imageante » (ce qui tend à faire du film une œuvre d’art). En d’autres termes, le film n’est pas au service d’une connaissance simple que le réalisateur mettrait en exergue, et sa signification n’est pas réductible à une idée transcendante. Au contraire, si l’idée est bel et bien exprimée, elle l’est dans une immersion corporelle qui fait sens (incorporation). La signification du film n'est ni exclusivement dans le sujet ou dans l'objet, mais dans une rencontre. Pour étayer sa thèse (« fonction  imageante »), Merleau-Ponty reprend l’argumentation-référence de Kant, dans la Critique du jugement : pour saisir authentiquement une œuvre d’art, il faut que se réalise en nous l’harmonie de deux de nos facultés l’entendement (nature intellectuelle) et l’imagination (nature sensible). Chez le philosophe allemand comme pour Merleau-Ponty, il y a un réel hiatus entre la sphère de l’œuvre (jugement esthétique) et celle du jugement de connaissance. Dans l’œuvre, l’entendement ne fait pas connaitre l’idée mais a pour but de faire émerger pleinement l’imagination ; c’est précisément ce que Merleau-Ponty nomme notre « pouvoir de déchiffrer tacitement ».

     Dés-lors, si l’on peut toujours isoler des concepts dans le film, c’est uniquement dans l’optique de procurer une satisfaction au spectateur à travers le jeu de l’imagination. Pour reprendre les mots de Paul Klee, en les détournant un peu, « le film ne reproduit pas le visible, il rend visible ». L’acte de voir, c’est la vie de l’œil, la vie du corps au moment de coïncider avec le monde et autrui – ou l’inverse (chiasme surprenant qui alterne le « touchant » et le « touché »). C’est ici, dans l’acte de voir, que surgit un « étonnement », une résonnance intérieure telle que le film permet quasiment de faire l’expérience de soi-même, ou tout du moins d’appréhender le monde extérieur et de nous apprendre quelque chose sur notre relation à ce monde. C’est donc la perception, « procédé selon lequel l’esprit humain lui-même se fabrique généralement une réalité », qui permet dans le film la connaissance du monde et de soi-même, comme aussi l’intersubjectivité. Il en va alors du cinéma comme de la phénoménologie, laquelle  décrit parallèlement l’engagement initial d’un corps-sujet dans le monde sans nécessairement l’expliquer dans une vue du haut, sous peine d’en réduire ou manquer la teneur. C’est dire que le sens se situe dans un principe antéprédicatif et immanent. Sous cet angle, le cinéma valide la phénoménologie.

 

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10 février 2008 7 10 /02 /février /2008 11:21


     Il nous a semblé intéressant de réfléchir au traitement du Mal dans l’œuvre cinématographique des Coen. Quelle est sa provenance? Sa légitimité ? Au gré de leurs créations, les réalisateurs ne s’attachent-ils qu’au simple constat d’un fatalisme de la violence, d’un Mal sans mobile où la mort apparait comme l’ultime absurdité ? Ou bien faut-il chercher dans leur filmographie les indices-mêmes de l’origine du Mal, lesquelles pourraient nous conduire à son explication ?

 



Malaise dans la civilisation et rousseauisme
    

      Les deux frères cinéastes se référent parfois aux traumatismes des guerres du Golfe (The Big Lebowski) et du Vietnam (No Country for old men) pour illustrer cette composante de l’humanité qu’est le Mal. L’arrière-plan est politique. Toutefois, tel qu’ils nous le présentent le plus souvent, ce Mal est toujours autonome, nourri comme l’arbre par la sève de l’essence de l’homme. Un mal emportant tout sur son passage comme la totalité des tueurs, psychopathes et hallucinés, qu’ils mettent en scène dans un esprit très proche de la BD, (du « Motard de l’Apocalypse » à Anton Chigurh, en passant par George «Babyface» Nelson et Gaear Grimsrud.). Dés-lors, c’est peut être justement cette mixtion douteuse des traumas américains au regard de l’histoire, alliés à un humour quasi-cartoonesque, qui fonde l’originalité et la force de leurs productions. (Le rendu noir et glauquissime, ainsi que le petit rire nerveux qui l’escorte toujours).

  
     Que cherchent-ils précisément à nous dire ? Sans doute que nous sommes entrés dans une période de l’histoire qui ne contient rien d’autre qu’une perspective sadienne des choses. La terre, enfin, pardon, les USA semblent n’être plus que cet autel sacrificiel que dépeint le shérif dans No Country, un autel sacrificiel qui, à l’instar de ce que pense ce dernier, n’aurait d’autre fin que lui-même. Malaise dans la civilisation et rousseauisme donc ; même la photo du film le donne à penser. [A ce propos, c’est à Roger Deakins que l’on doit la photographie magistrale de la plupart de leurs métrages]. Que ce soit le désert de No Country ou les grandes étendues enneigées de Fargo, des paysages immaculés et a priori vides de sens, la photographie annonce toujours un sentiment de tragédie inéluctable. Il suffit pour cela que les hommes se croisent et se rassemblent en formant ce qu’il faut appeler la civilisation. [Pour ce qui est de la faune qui peuple ces terres, il n’existe que trois catégories possibles : les gus et culs-terreux ordinaires, les conformistes et les psychopathes, arborant presque tous une coiffure invraisemblable]. La société apparait alors comme le support de la dévastation et de la destruction. La violence y est assumée « entre hommes ». En imposant des restrictions à leur liberté, mais surtout en faisant du dollar le « maître » étalon, la civilisation génère des névroses, lesquelles mènent aux boucheries.

    
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     Dans le cinéma « coennien », les injustices et les cadavres ne manquent jamais d’apparaitre dés que les hommes traitent entre eux et échangent. (cf : Rousseau, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes). Le royaume de l’humanité est pourri. Sans aller jusqu’à faire l'éloge du bon sauvage, on peut voir que leurs films contiennent une certaine nostalgie d’un état quasi-naturel - utopique puisqu’il ne s’est jamais trouvé un tel état - où le bonheur était plus simple et où les rapports économiques n’étaient pas encore un problème. (La plupart de leurs métrages ont un lien plus ou moins direct avec l’économie de marché, comme nous allons le voir). Dés-lors, si la démarche des Coen semble plus factuelle que didactique, ne croyons pas qu’il s’agisse-là d’une abdication des causes et des raisons du Mal, bien au contraire.
 
 

Egoïsme et avidité des hommes: le fil-rouge des kidnappings et la critique du capitalisme

 

    
     Pour reprendre cette idée d’un mal irréductible comme partie-prenante (mais non exhaustive) de la condition humaine, il nous faut être plus précis. Commençons par rappeler que la plupart des films des Coen met en scènes des individus ordinaires cloitrés dans leur égoïsme et leur avidité. Egoïsme et avidité des hommes, sources du mal ? Peut-être. A ce titre, le kidnapping, véritable fil-rouge de leurs œuvres, semble mettre en lumière de façon paradigmatique ces deux caractéristiques. Plus encore, à travers la déclinaison de kidnappings que nous proposent les deux réalisateurs, un véritable déterminisme économique se met toujours en place, un déterminisme finalement assez proche des rouages du capitalisme. (On trouve pleinement cette thématique du capitalisme dans Le Grand saut, dans lequel les membres du conseil d'administration d'un empire industriel décident de nommer à leur tête un idiot pour remplacer le président qui vient de mourir, ceci dans le but de faire chuter les actions et de les racheter à bas prix.) Dés-lors, on s’aperçoit que les deux frères s’attachent à pointer du doigt un système où les êtres se trouvent implacablement réduits à des valeurs d’échange (kidnapping) et où l’on ne court qu’après le profit (somme exigée). Dans Arizona Junior, un couple (stérile et envieux) vole un bébé - qui deviendra l’objet d’une rançon - à un autre couple qui vient d’avoir des sextuplés ; dans Fargo, un quidam couvert de dettes fait enlever sa femme pour obtenir quelques dollars de son fortuné beau-père ; le Dude de The Big Lebowski est injustement persécuté par des nihilistes allemands qui réclament le règlement d’une parodie d’enlèvement grand-guignolesque; dans The Barber, l’homme qui n’était pas là décide de faire chanter financièrement l’amant de sa femme ; dans Intolérable cruauté, l’argent est positionné face à l’amour; et enfin, le cowboy de No Country sait qu’il fait une connerie en prenant cette mallette fourrée de dollars mais ne peut s’en empêcher tant son avidité est grande. Celui-ci est même prêt à mettre la vie de celle qu’il aime en jeu pour ce butin. Pour une poignée de dollars ou Pour quelques dollars de plus, pourrait-on dire. La propriété et l’enrichissement sont la forme d’un pouvoir malsain. Référons-nous un instant à cette scène dans The Big Lebowski, où, sur le parking du bowling, les blousons de cuir teutons tentent de récupérer l’argent :

 

 

 

« -Walter : Sans otage, pas de rançon. Ca sert à ça la rançon. C’est la règle.

 

   -Uli : Il n’y a pas de REGLE.

 

   -Walter : PAS DE REGLE ?! SALE BOUFFEUR DE CHOUCROUTE !

 

   -Kieffer : Sa copine a donné son orteil. Elle croyait qu’on aurait un million. C’est pas juste.

 

   […]

 

   -Uli : Okay, on prend le fric que vous avez et on est quitte !

 

   -Walter : Allez vous faire foutre.

 

   Le Gus fouille dans sa poche.

 

   -Gus : Allez, on s’en sort pour pas cher.

 

   -Walter : Ce qui est à moi est à moi. 

 

   -Uli : ON VA VOUS NIQUER. ON VEUT LE FRIC ! »

 

     Cette idée de se repasser les individus en échange de billets verts est toujours vouée à l’échec. D’autant plus que, au final, l’argent des « rançons » (contenu dans des mallettes ou des sacs) ne profite jamais à personne. La course au profit reste vaine. A la fin de Fargo, Marge, qui vient d’arrêter Gaear Grimsrud et le conduit en voiture vers la prison, lui tient ce propos (leurs regards se croisant par l’entremise du rétroviseur intérieur) : « C’était bien madame Landegaard qu’était allongée à côté, hein ?... Et c’était certainement votre complice dans le broyeur, n’est-ce pas ?... Et il y a les trois victimes de Brainerd… Pourquoi ? Pour une poignée de billets. La vie vaut plus qu’une poignée de billets. Vous ne savez pas ça ?... ».
 

    
     Egoïsme et avidité, sans cesse réactualisés par l’Homme postmoderne, l’Homme du profit, sont ainsi partout présent dans leur œuvre et semblent expliquer la violence et le mal qu’elle contient.

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Liens familiaux, argent et début des ennuis
 

« Ce n’est pas parce qu’on est proches qu’on est des pigeons ! », Walter. (The Big Lebowski)

 

     On remarquera également que les rapports qu’entretiennent les membres des familles, dans les métrages « coenniens », ne sont pas anecdotiques, surtout pour des frères coréalisateurs. Les liens familiaux ont-ils  leur mot à dire à propos de la violence ? Sans être calé en psychanalyse, on peut remarquer que les carnages qui s’enchainent débutent souvent chez les Coen par un problème de famille. Des liens pervertis par l’argent. Un amour mal évalué. Dans Blood simple/Sang pour sang, un homme ordinaire découvre que son épouse le cocufie et engage un pro pour la supprimer ; dans Arizona junior, le couple se détruit faute de pouvoir fonder un foyer et décide d’enlever un enfant ; dans Miller’s Crossing, c’est le beau-frère qui va déclencher la guerre des gangs ; dans Fargo (tiré d’un fait-divers authentique), il ne s’agit rien de moins que de faire enlever sa propre femme pour rançonner son beau-père ; dans The Barber, l’épouse est à nouveau infidèle ; et dans No Country, c’est l’éternelle belle-mère atrabilaire et hargneuse qui cause directement la mort de Llewelyn. Il y a toujours un lien familial pour foutre la merde, de près ou de loin. Mais puisque notre visée consiste à ne pas (trop) mélanger la vie des réalisateurs et leurs créations, il est impossible d’aller plus loin sur ce point.

    

     Pour conclure, nous croyons voir, dans l’ensemble de leur filmographie, la trace ou la tentation d’une règle morale qui suit un schéma binaire et quasi-religieux selon lequel « faute égale souffrance ». (Prendre cette mallette est une faute, mais je le fais quand même, idem pour le vol d’un enfant ou le rapt de ma propre femme). Les Coen font donc le constat d’un Mal qui n’est pas tout à fait sans raison, et s’attachent avec brio (à l’exception du regrettable Ladykillers et, dans une moindre mesure, de Intolérable cruauté) à nous le présenter comme un ensemble d’excès que l’homme n’a pas su maîtriser (carnages à tous les étages), dans un monde où l’on a depuis longtemps trahi le Bien au profit du roi dollar.
 


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Filmographie des frères Coen :

  -          SANG POUR SANG (BLOOD SIMPLE) – 1984

-          ARIZONA JUNIOR (RAISING ARIZONA) – 1987

-          MILLER’S CROSSING – 1990

-          BARTON FINK – 1991

-          LE GRAUD SAUT (THE HUDSUCKER PROXY) – 1994

-          FARGO – 1996

-          THE BIG LEBOWSKI – 1998

-          O'BROTHER (O'BROTHER WHERE ARE THOU?) – 2000

-          THE BARBER (THE BARBER THE MAN WHO WASN’T THERE) – 2001

-          INTOLERABLE CRUAUTE (INTOLERABLE CRUELTY) – 2003

-          THE LADYKILLER’S – 2004

-          NO COUNTRY FOR OLD MEN - 2007



 

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